Crise de croissance ?
Un grand vent souffle sur le monde arabe : vent de révolte et vent de liberté. Des peuples veulent changer de modèles politiques. Certes, l’accouchement d’un nouveau régime n’advient pas sans douleur, ni même en 24 heures, mais les événements n’en sont pas moins porteurs d’espérance. Des hommes et des femmes se lèvent pour exprimer et mettre en œuvre leur désir d’une société plus juste et plus libre ; leur grandeur et leur dignité se manifestent dans la foi et l’espérance d’un monde nouveau. Ces peuples s’engagent sur un chemin long et difficile, mais la croissance d’une conscience plus humaine est un don à conquérir.
Qui a quelque peu vécu dans le désert sait que rien n’arrête un vent de sable ; l’espérance d’une vie démocratique s’insinue partout et passe les frontières. Certains chefs d’état démissionnent, d’autres essaient d’anticiper, mais restent les « irréductibles », ceux qui, contre vents et marées, refusent l’inéluctable et s’accrochent au pouvoir. Parmi eux, Kadhafi ! Se disant « Guide aimé de son peuple », comment peut-il en décider le massacre ? C’est inouï ! Nous assistons à l’anéantissement d’un pays et ses habitants par l’armée qui a vocation à les protéger : perversion insoutenable ! Je suis de ceux qui supportent mal d’assister, impuissants, à ce massacre d’innocents et de manifestants dont la folie était de croire à leur bonne étoile ! Des chefs d’état agissent en concertation « pour protéger le peuple ». Beaucoup se passionnent et critiquent l’intervention de la coalition ; les mêmes auraient peut être critiqué une inertie... Qu’importe !
Nous sommes concernés par les événements dès lors que nous en avons connaissance; que nous agissions ou non, notre responsabilité est engagée et le pire serait notre indifférence. Il nous incombe de reconnaître nos connivences et nos solidarités avec les différents acteurs de ce drame. Je tiens néanmoins à souligner les efforts déployés par les uns et les autres pour sortir de cette crise et en sortir grandis, plus humains !
L’essentiel maintenant, c’est que des chefs d’états se rencontrent, que des diplomates s’activent, que des hommes et des femmes essaient de s’entendre… Je me réjouis que des personnes extrêmement différentes et parfois divergentes dans leur manière d’être, se mobilisent pour protéger un peuple. Le Seigneur sait que nous en faisons toujours ou trop, ou pas assez. C’est vrai pour nos chefs d’état, ça l’est aussi pour nous qui en faisons ou trop, ou pas assez ; notre comportement n’est pas toujours très ajusté… pourtant, le Seigneur compte sur nous pour conduire l’humanité vers la « terre promise ». Il sonde les reins et les cœurs et nous accueille tels que nous sommes, avec nos diverses motivations ; le Seigneur nous rejoint dans nos situations conflictuelles pour nous guider vers une conscience plus affinée de notre véritable grandeur humaine et vers de vraies relations fraternelles.
Je veux croire que les relations qui se nouent autour de ce désir de liberté des peuples arabes peuvent être une avancée vers plus de paix et de solidarité. Que le Seigneur ouvre notre oreille de disciple pour que nous entendions sa Parole et devenions dociles au vent de l’Esprit ; alors amour et vérité se rencontreront, justice et paix s’embrasseront sur notre terre bénie de Dieu.
Florence, Carmélite de St Joseph , 15 avril 2011
