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Visite du Conseil Général à Madagascar
Octobre 2009

Du 26 septembre au 15 octobre 2009, le Conseil Général du Carmel St Joseph est allé à la rencontre de nos communautés de Madagascar, à la rencontre de ce pays aussi, de ses réalités, de son peuple.

Nous sommes rentrées, pendant trois semaines, dans la réalité de la Grande Ile, la 4ème du monde, Madagascar : un territoire grand comme la France et le Benelux réunis... De nombreuses régions sont encore inaccessibles. L’île est traversée et endommagée par des cyclones à la saison des pluies ; l’instabilité politique récurrente, les gestions économiques hasardeuses, le choc de la mondialisation et la crise actuelle aggravent encore la pauvreté : plus de 50% de la population vit encore en dessous du seuil de la pauvreté absolue ; le taux de scolarité a chuté lui aussi, de 68% avant la récession à moins de 42% dans certaines régions, faute de moyens pour payer les écolages dans un pays peu structuré sur le plan de l’éducation...

Comme de nombreux pays dits du "Sud", Madagascar est essentiellement à vocation rurale. Or, pour protester contre les régimes politiques durs et pour trouver des moyens de subsistance, la population a allumé pendant plusieurs périodes de gigantesques incendies et continue, aujourd’hui encore, à couper des arbres pour faire commerce du charbon de bois : déforestation, désertification, ravinement des sols… Beaucoup d’habitants des zones rurales ont émigré vers les villes dans l’espoir d’un travail ou d’une situation meilleure : la crise les a rejoint et nombreux sont les retours à la campagne pour des familles qui ont tout perdu... mais ne retrouvent pas leur situation antérieure.

Ce tableau est réaliste mais ne rend pas compte, bien sûr, de la réalité de la vie sur la Grande Ile : la bonne humeur, la joie de vivre, la danse et le chant, le sens aigüe de l’hospitalité, la beauté des visages et des paysages… Tout cela est Madagascar : on en revient enchanté et déchiré, saisi par une immense urgence ; on voudrait tout faire, tout prendre à bras le corps… La sagesse ancestrale nous rattrape : "Si tu ne peux faire une grande corbeille, fais au moins un petit panier", Olabola (Proverbe malgache). Nous avons déjà commencé à tresser quelques "petits paniers"...

"Si tu ne peux faire une grande corbeille,
fais au moins un petit panier"

Les Carmélites de St Joseph sont présentes en trois communautés sur les Hauts-Plateaux : deux en pays Imerina à Tananarive et Antsirabé, une en territoire Betsileo à Fandriana dans le diocèse d’Ambositra.

Nos "préférences" en matière d’engagement sont ciblées et, bien que modestes, tentent de répondre aux défis auxquels le pays doit faire face.

Revaloriser le monde rural

La majeure partie du développement s’effectue dans les villes qui bénéficient quasiment de toutes les ressources du monde moderne. Mais, dans ce pays, la richesse est agricole et le développement devrait se faire au niveau des campagnes. Il est urgent de développer une technologie adaptée au monde rural. Une de nos sœurs a créé et dirige un Centre d’Aide au Travail dans un gros bourg proche de Fianarantsoa. Six familles ont bâti leurs maisons sur le périmètre du Centre, y vivent et travaillent, rejointes dans la journée par une trentaine de personnes ; leurs enfants sont scolarisés sur place en classes préscolaires. Le CAT "La Bougainvillée" se situe à Ambohimahasoa ; il développe plusieurs secteurs de formation technique et agricole pour l’économie rurale.

Par ailleurs, nous formons le projet d’une implantation communautaire en monde rural pour y établir une ferme de culture et d’élevage de dimension plus importante que les cultures vivrières des communautés déjà existantes. Ce projet est rejoint par un appel du diocèse de Fianarantsoa à prendre en charge un secteur rural en pastorale et scolarisation.

Accompagner les jeunes générations

Les trois-quarts de la population ont moins de trente ans ! Les études calquées sur le système scolaire français conduisent directement au chômage et à la délinquance : au-delà du cycle primaire, la scolarité s’effectue dans les villes ; après le BEPC ou le BAC, les jeunes ne retournent pas au village...

Nous tentons de développer, dans nos trois communautés, un enseignement primaire bilingue de qualité. L’urgence est aujourd’hui à l’extension de nos écoles jusque-là cantonnées au préscolaire. En collaboration avec d’autres communautés religieuses, comme celle des Frères de St Gabriel à Fandriana qui dirigent un Collège et Lycée, nous voulons favoriser le maintien des jeunes à la campagne par la création de secteurs professionnels et techniques de bon niveau, sans négliger les filières d’enseignement général.

Travailler à l'inculturation de la foi chrétienne

Les Malgaches sont à la fois des Asiatiques et des Africains ; ils ont un besoin très profond de références et cherchent le sens spirituel qu’ils ne trouvent pas toujours dans la forme du christianisme qui leur est présentée... La communication de la foi est particulièrement importante aujourd’hui face à la montée des sectes. Tout en adhérant à la foi chrétienne, symbole de progrès et de développement, beaucoup de Malgaches cherchent auprès des sectes la réponse à leur besoin de surnaturel ou de supranaturel. Sectes priantes, prophétiques, eschatologiques, guérisseuses sont en très grand nombre et en implantation croissante : très actives et présentes partout...

La Bible qui serait parfaitement en harmonie avec le fondement de la culture est peu enseignée. L’Eglise deviendra malgache si elle retrouve le sens profond du spirituel, le lien avec le surnaturel ; si elle redevient contemplative, orientée vers le mystère de Dieu en Christ. Dans chacune de nos communautés, les sœurs sont engagées dans la pastorale de secteur. Les espaces de prière communautaire sont ouverts et des sessions organisées pour communiquer, aux jeunes générations surtout, l’enracinement biblique et théologal de la tradition du Carmel et de la vie spirituelle chrétienne...

Le joie de 4 professions !

Enfin, pour terminer ce tour d’horizon, nous avons eu la joie d’une superbe fête : la profession perpétuelle de nos sœurs Lanto, Rosalie, Catherine et Zoëline-Elie, dans l’église paroissiale de Fandriana. Grande première pour la communauté chrétienne que de célébrer avec les Carmélites de St Joseph en cette occasion... Moment grave et intense pour nous, pour les familles et les nombreux chrétiens, jeunes et moins jeunes, venus entourer nos sœurs.

Le rite malgache de la profession religieuse comporte le temps de la bénédiction des parents : "Voici que ton corps n’appartient plus à notre famille... dans la mort, tu reposeras auprès de tes sœurs"... Ces paroles et gestes, improvisées par chacun des parents, marquent le don qui est fait mais aussi le départ, le commencement d’un voyage... Telle est la foi chrétienne et la profession évangéliques par les vœux. Nous souhaitons "bonne route" à nos sœurs au chemin de l’Evangile !

Après la célébration, un repas réunissait 400 personnes dans les locaux de la paroisse… Il fallait bien ce gigantesque gâteau de profession, porté en procession et découpé dans les règles, pour terminer dans la douceur et la joie…

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