>>> Aventure intérieure> Paroles humaines, Parole de Dieu > La miséricorde dans l’évangile selon st Luc > 05

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

05 Le Bon Samaritain, ministre de la Miséricorde : Lc 10, 25-37

Un docteur de la loi vient mettre à l’épreuve ce Jésus qui enseigne sans mandat officiel. Mais tel l’arroseur arrosé, le légiste est pris à son propre piège : à sa question Jésus répond par une autre question. Il voulait jouer au maître, il se retrouve à la place du disciple.

La question du légiste a de quoi étonner : « Maître, que dois-je faire pour avoir part à la vie éternelle ? » (v25) La vie est un don. Fait-on quelque chose pour recevoir un don ? Mais le docteur de la loi présente la vie éternelle comme un héritage (thème que nous retrouverons en Lc 12 et Lc 15). Fait-on quelque chose pour avoir un héritage ?

Jésus renvoie le légiste à lui-même et à l’écriture, au contenu de la loi mais aussi à sa manière de comprendre et d’interpréter cette loi. Le docteur de la loi trouve la bonne réponse. L’histoire pourrait s’arrêter là. Mais elle rebondit par une nouvelle question du légiste : « Et qui donc est mon prochain ? » (v29). Le mot hébreux pour dire prochain, peut aussi se traduire par autrui. Dans l’Ancien Testament, le prochain est essentiellement le frère Israélite et l’étranger résident (Lv 19). Dans le Nouveau Testament, le prochain c’est tout autre, fut-il un ennemi (Mt 5, 43-48).

Dans sa question, le légiste reste centré sur lui-même : Qui est mon prochain autrement dit qui dois-je aimer ? A la fin de la parabole, Jésus déplace le centre du moi à l’autre :
« Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l'homme qui était tombé entre les mains des bandits ? »
(v36) autrement dit qui requiert mon amour ? Du début à la fin, Jésus renvoie le docteur de la loi à son faire : « Fais ainsi et tu auras la vie. » (v28) ; « Va, et toi aussi fais de même. » (v37). Oui, il y a bien un faire à faire pour avoir la vie, mais à condition de ne pas se tromper de faire. Jésus pousse le légiste à se laisser déplacer d’une loi extérieure vers une loi intérieure, en un mot à s’ouvrir à la miséricorde. Et c’est bien cela dont il s’agit dans la parabole.

« Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l'avoir dépouillé, roué de coups, s'en allèrent en le laissant à moitié mort. » (v30). Cet homme a besoin d’être sauvé. Tout la question est de savoir qui va le sauver ? Un prêtre (v31), un lévite (v32) passent par là. Tous deux sont soumis aux lois de pureté : « Aucun d’eux ne se rendra impur près du cadavre de l’un des siens » (Lv 21,1). Mais l’homme n’est pas mort. Il est entre la vie et la mort. En passant de l’autre côté, le prêtre comme le lévite se rangent du côté des bandits.

Jésus fait entrer en scène un Samaritain qui lui aussi est sujet de la loi, même si les juifs considèrent les Samaritains comme schismatiques. Comme Jésus dans le récit de la veuve de Naïm, ce Samaritain est saisi de pitié et s’approche de l’homme blessé (v33-34). Il prend soin de lui en payant de sa personne (v34-35) et en encourageant un autre à faire de même.

Il n’est pas anodin que Jésus choisisse un Samaritain comme héros de sa parabole. Il ne s’agit pas tant de faire honte au docteur de la loi - « Vois, celui que tu méprises, fait mieux que toi » - que de susciter un écho dans la mémoire du légiste, lecteur attentif de l’Ecriture. En effet, dans le contexte des guerres syro-éphraïmites, sous l’impulsion du prophète Obed, les ancêtres des Samaritains s’étaient révélés ministres de la miséricorde envers les Judéens, leurs frères (2 Ch 28, 9-15).

Ainsi, tout disciple sera ministre de la miséricorde en se faisant proche de tout autre qui a besoin de lui pour vivre, en lui donnant les moyens pour vivre, en le considérant comme un frère. C’est à cette condition que nous hériterons de la vie éternelle. « Heureux les miséricordieux car ils obtiendront miséricorde » (Mt 5, 7). La parabole se déploie dans deux sens : à la fois comme exemple de ce qu’il y a à recevoir et à la fois comme exemple de ce qu’il faut faire, donner.

L’histoire de l’homme blessé est celle de Jésus qui meurt de s’être fait le prochain de tous, se laissant approcher, atteindre dans son lieu de pauvreté, de vulnérabilité, de mort. L’histoire du Samaritain est aussi celle de Jésus qui se fait le prochain de tous, en rejoignant chacun dans son lieu de pauvreté, de vulnérabilité, de mort.

Cette vie éternelle dont le légiste demande à hériter, n’est pas affaire de loi ou de récompense pour bonne conduite. Elle jaillit de la déchirure du cœur comme pour la pécheresse pénitente, dans un relation vivante et le don de soi-même aux autres et au Tout-Autre.

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