>>> Aventure intérieure> Paroles humaines, Parole de Dieu > La miséricorde dans l’évangile selon st Luc >11

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

11 La brebis et la pièce perdues: Lc 15, 4-10

Cette parabole, adressée aux scribes et aux Pharisiens qui murmurent devant l’accueil de Jésus envers les Publicains et les pécheurs, est dédoublée. La première partie (v4-7) met en scène un homme, un berger ; la seconde partie (v8-10) met en scène une femme, une maitresse de maison. Les deux parties sont parallèles et développent la même idée avec quelques nuances.

« Si l'un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu'à ce qu'il la retrouve ? » (v4). D’emblée Jésus implique ses auditeurs en leur rappelant le projet de Dieu qui veut rassembler son troupeau : « Je chercherai (la brebis) qui est perdue, je ramènerai celle qui est égarée, je panserai celle qui est blessée, je fortifierai celle qui est malade. » (Ez 34, 16). Jésus fait les mêmes œuvres que Dieu : il part à la recherche de la brebis perdue (v5) ; il convie les justes à la joie des retrouvailles (v6). Est juste celui qui fait les œuvres de Dieu. Jésus invite ses auditeurs à se comporter en berger comme lui.

Le berger, comme la maitresse de maison, une fois retrouvé ce qui était perdu, invitent les amis et voisins, les amies et voisines à se rassembler dans la joie. Les scribes et les Pharisiens interprètent l’attitude de Jésus envers les Publicains et les pécheurs comme une trahison. Alors que ceux sont eux qui se tiennent à l’écart. Ils n’ont pas compris que la joie du retour n’est pas seulement la joie des retrouvailles entre la brebis perdue et son maitre, mais celle des retrouvailles de toutes les brebis : la brebis perdue et les 99 autres, sous la houlette de l’Unique Berger. La joie doit s’étendre aux ami(e)s et voisins/ voisines sinon elle n’est pas totale. Tous sont invités et le cercle va s’élargissant jusqu’au ciel (v7) jusqu’aux anges de Dieu (v10).

Souvent face à cette parabole, on se focalise sur le pécheur qui se convertit oubliant les 99 autres qui n’ont pas besoin de conversion. Qui peut prétendre ne pas avoir besoin de conversion ? Car les véritables pécheurs de la parabole pourraient bien être ceux qui se croient justes. S’ils repoussent l’invitation à partager la joie des retrouvailles, c’est qu’ils ne se comportent ni en amis ni en voisins du Bon Pasteur. Certes la miséricorde de Dieu s’exerce pour celui qui est parti loin et revient. Mais elle s’exerce aussi et autant pour celui qui se croit proche, car il ignore son éloignement, moins visible extérieurement.

« C'est ainsi qu'il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de conversion. » (v7). « Il y a de la joie chez les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit. » (V10). Les deux phrases conclusives sont semblables et différentes. Le temps des verbes et le lieu de la joie diffèrent. Au verset 7, le verbe est au futur et la joie se situe dans le ciel : c’est une vision eschatologique lorsque le projet de Dieu sera totalement accomplit. Au verset 10, le temps du verbe est au présent et la joie est celle des anges. C’est un déjà-là en devenir. L’écart entre ces deux phrases souligne tout le chemin que chacun est invité à parcourir pour entrer dans la joie de Dieu.

Il est amusant de remarquer qu’en Français, on a de la joie, alors qu’en Grec on est joie. Un premier pas vers la conversion est de lâcher la possession de la joie pour être saisi par elle. Comme dans la parabole du figuier sans récolte, tout à chacun est invité à produire des fruits de conversion. La joie est un de ces fruits. Le figuier produira des fruits dans l’avenir s’il se laisse soigner par le vigneron.

Etre perdu c’est être en rupture de relation avec Dieu et les autres, parfois aussi avec soi-même. Etre trouvé (et non se trouver) c’est se laisser rétablir dans la relation, c’est passer de l’isolement à une solitude reliée. On parle du pécheur qui se convertit. Ne devrions-nous pas plutôt parler du pécheur qui se laisse convertir ? Car passer de l’état de perte ou du sentiment d’être perdu à l’état de recouvrement ou du sentiment d’être trouvé, est un mouvement qui se vit à plusieurs : avec Dieu, avec les autres, avec soi-même.

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