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Béatification de Jean Paul II :
                                  l’audace de l’Eglise !

La béatification de Jean Paul II a suscité des réactions bien diverses dans les media de toute tendance : la plupart enthousiastes, certaines sceptiques, d’autres encore indignées, voire hostiles…

Je souhaiterais risquer aujourd’hui une parole à distance des clameurs et de l’émotion des premiers mouvements, une parole qui tente d’approcher cet événement à la lumière de l’Evangile. Suis-je capable, un instant, de faire passer au second plan, mon opinion, mon attrait ou mes réserves, pour me laisser toucher par cette trajectoire humaine et croyante que l’Eglise me donne à déchiffrer comme une page d’Evangile ?

Oui ! J’entends ici l’audace de l’Eglise : elle ne craint pas de poser sur le visage de cet homme – Jean Paul II – sur son histoire, ses choix, ses particularités, l’exclamation qui ouvre les Béatitudes : « Bienheureux ! ». Disant cela, que fait l’Eglise ?

Elle n’invite pas à applaudir le personnage public, le grand homme de pouvoir, le géant des grands rassemblements de la jeunesse croyante…

L’Eglise expose un homme en marche, la longue marche d’un homme disciple et ami de Jésus Christ ! Ce n’est pas lisse une traversée humaine dans la foi : on peut en dénombrer les zones d’ombre, les choix incertains et discutables, les erreurs et les échecs… Ou, tout au contraire, les réussites et les victoires, les conquêtes de haute lutte…

Or l’Eglise met à nu, sous une lumière crue, sans fard ni retouche un moment, à la fois immense et infime de sa propre « histoire sainte ». Un peu comme les Livres bibliques des Rois ou des Chroniques, ou encore les Actes des Apôtres, nous racontent des chemins d’humanité, « Présences d’Evangile », dans la violence de l’histoire politique et sociale, dans les méandres des itinéraires singuliers et communs : difficile liberté, difficile fraternité à tenir au long des jours…

Comment déchiffrer, à travers la béatification de Jean Paul II, une page de « l’histoire sainte » de l’Eglise, une page de l’Alliance de Dieu avec notre humanité, toujours rompue et toujours à nouveau offerte et conduite par l’Esprit ?

Nous n’entendrons pas ce chant de l’Alliance si nous pesons ce moment d’histoire comme le bilan compté des paroles et des actes d’un grand homme…

Nous pouvons y goûter la saveur de l’Evangile si nous recevons cette histoire comme la traversée immense et infime d’un homme debout et en marche au nom d’une passion, passion pour Jésus Christ, passion pour les humains, en route eux aussi.

Dans le chemin d’humanité, parcouru par Jean Paul II, nous pouvons entendre et vivre aujourd’hui la parabole évangélique de la semence du Royaume : « Si le grain de blé jeté en terre ne meurt pas, il reste seul ; s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » (Jean).

Et comme jadis, en Galilée, au bord du lac, Jésus s’étonne de nos oreilles bouchées et de nos yeux aveuglés : « Vous ne comprenez pas cette parabole ? Alors, comment comprendrez-vous toutes les paraboles ? » (Marc).


Sr Frédérique, Carmélite de St Joseph , 11 juin 2011

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