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Pour quel combat ?

Le « Printemps arabe »… Il s’agit bien d’un éveil des peuples, éveil d’un véritable désir de construire des nations plus justes où chacun peut espérer vivre de paix, de liberté, de respect des différences et porter ce projet avec tous ces concitoyens. Ce mouvement porte l’espérance forte qu’un jour, le monde éradique les dictatures pour des régimes démocratiques et pluralistes propres à la culture de chaque pays. En attendant, nous assistons à des mouvements de révolte très violemment réprimés. Certains ont pris les armes, d’autres les refusent majoritairement et amplifient leur contestation paisible, mais ferme. La situation au Moyen-Orient montre, une fois de plus, l’immense difficulté à sortir d’un totalitarisme. Les enjeux sont considérables, aussi des sentiments paradoxaux montent en nous : joie et espérance devant l’amplitude du mouvement révélant la force d’un désir de paix et de justice qui soulève les foules, mais également, l’inquiétude et l’indignation.

Nous savons ce que nous perdons, mais ignorons ce que nous gagnerons. Quitter un régime totalitaire plonge un pays dans le chaos le temps d’arriver à un nouvel équilibre et génère beaucoup de souffrance. Le désir de liberté, de paix et de justice pour tous s’exprime, mais les hommes de pouvoir répondront-ils à cette attente pour construire un mode de vie meilleur ou profiteront-ils du chaos pour durcir leur politique ?
Quant à l’indignation, le terme me paraît faible. Nous sommes littéralement choqués par la violence de la répression gouvernementale lorsqu’elle a lieu. Choqués, nous le sommes aussi devant une Europe qui, au nom des droits de l’homme, est capable de bombarder Tripoli, mais pas d’ouvrir ses portes à des exilés recherchant travail et abri. Les Occidentaux ont tout à apprendre du monde arabe quant à l’hospitalité de l’étranger qui frappe à sa porte ! 

Cela me plonge dans l’histoire biblique révélant notre histoire humaine et particulière : « Mon père était un Araméen errant qui descendit en Egypte et c’est en petit nombre qu’il vint s’y réfugier… les Egyptiens nous maltraitèrent, nous brimèrent et nous imposèrent une dure servitude. Nous avons fait appel au Seigneur... Il entendit notre voix, vit notre misère, notre peine et notre état d’oppression et le Seigneur nous fit sortir d’Egypte… » (Dt 26, 5b ss).
Cette sortie a été longue, éprouvante, risquée… Plus tard, Jésus s’est engagé et risqué pour la libération de l’homme ; appelant une faible minorité à sa suite, il n’a cessé d’appeler les pharisiens à sortir de leur repli communautaire et identitaire. Prônant la non violence, le dialogue en vérité, la réconciliation et la recherche de la justice, le Christ nous a tracé la voie pour un monde plus fraternel. Il y a perdu la vie. Ressuscité, il s’est révélé comme le Vivant toujours présent au cœur de nos combats.
Je crois discerner un germe profondément évangélique dans le désir de construire une société démocratique et pluraliste, capable de garantir les droits de chacun, y compris des minorités ethniques et religieuses, ainsi que la dignité de tous. Nous n’avons pas fini de sortir de nos servitudes, celles que nous imposons à d’autres et celles qui nous sont imposées. Quelles sont nos solidarités ? Pour quoi, pour qui, pouvons-nous livrer notre vie ? Quel chemin souhaitons-nous prendre pour devenir plus humains et plus fraternels ?


Sr Florence, Carmélite de St Joseph , 15 juin 2011

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