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Photo : Monastères du Wadi Natrun, Egypte.

Vivre le Carême avec la Samaritaine,
dans la tradition du Carmel (Etape 1)

Par Sr Frédérique Oltra

Je vous propose de revenir, au cours de ces cinq semaines de Carême, au cœur de la vocation de disciple de l’Evangile, en regardant Jésus, à travers un récit cher à la tradition du Carmel : la Samaritaine en Jn 4,1-42.

"Donne-moi à boire !"

La rencontre de Jésus avec la Samaritaine commence par une demande de Jésus. De façon mystérieuse, notre histoire spirituelle, est peut-être enracinée dans une telle question. Je suis ici, nous sommes ici parce qu’un jour, notre cœur a vibré à la soif de Jésus. Parce que nous avons entendu, chacun à notre manière, cet appel qui nous est adressé personnellement : Donne-moi à boire !

Comme avec la femme de Samarie, Jésus a pris les devants de la rencontre avec nous. Cela a été pour nous une révélation : est-ce bien auprès de moi que le Christ veut étancher sa soif ? Est-ce qu’il y aurait en moi quelque chose comme une source, capable de répondre à son désir ? Est-ce que j’ai de quoi donner, moi qui ai tellement besoin de recevoir ? Quelles que soient les motivations diverses, peut-être obscures, qui nous ont mis en chemin, nous sommes là aujourd’hui parce que le Christ redit, chaque jour, à notre cœur : Donne-moi à boire !

Je vous propose de nous arrêter sur trois approches carmélitaines de cette figure de la Samaritaine et d’en dégager au fur et à mesure, à partir de l’expérience spirituelle qui est la mienne et la nôtre, les enjeux pour les hommes et les femmes de notre temps, pour notre monde contemporain.

Une vie travaillée par la Parole de Dieu

"Je me rappelle maintenant ce que souvent j’ai pensé de cette sainte Samaritaine : comme les Paroles de Dieu avaient bien pris dans son cœur !"
(Thérèse d’Avila, Pensées sur l’amour de Dieu)

Je voudrais parcourir avec vous, en ce premier temps, trois grands lieux de l’expérience au Carmel : l’oraison (prière silencieuse), la lecture priante de la parole de Dieu et la vie fraternelle en Eglise. Les quelque trente années de cheminement que j’ai vécues m’inclinent à penser qu’il s’agit bien d’un unique mouvement, en ces trois espaces auxquels nous consentons et pour lesquels nous donnons du temps : vivre sous l’autorité de la Parole, à la lumière de la Parole !

Garder le regard fixé sur Jésus

Ce regard fixé sur le Christ assoiffé de notre amitié est bien l’espace central dans lequel nous vivons. Cette parole qui nous a mis en marche devient, au fil des jours, écoute de l’Esprit : en elle, nous discernons pourquoi et comment poursuivre notre marche.

Dans cette contemplation de Jésus, nous puisons des forces pour espérer encore dans les moments de doute ou d’échec. Dans cette contemplation de Jésus, nous recevons une volonté plus grande pour aimer et poursuivre l’aventure de la vie fraternelle. Dans cette contemplation de Jésus, nous trouvons l’élan nécessaire pour engager tout notre dynamisme dans la mission qui nous est confiée.

Nous ne connaissons pas d’autre lieu, d’autre moyen que le retour incessant à cette source qui nous fait vivre.

Ainsi, dans la méditation de la Parole et dans la prière, nous découvrons, avec émerveillement, qu’avant de nous offrir quoi que ce soit, Jésus nous demande, comme un mendiant, ce qu’il va nous donner au centuple. Son désir de notre foi et de notre compagnie éveille en nous le désir de l’eau vive, le désir de Lui-même : "Seigneur donne-moi cette eau pour que je n’aie plus soif et que je n’aie plus à venir puiser ici" (Jn 4,15).

A certains jours, nous avons le douloureux sentiment d’être saturés, de n’avoir plus soif de rien, d’avoir perdu le chemin qui mène à la source… Nous revenons alors à la soif de Jésus, car c’est en elle que nous puiserons de quoi raviver notre désir profond : "Si tu connaissais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : ‘Donne-moi à boire’, c’est toi qui aurais demandé et il t’aurait donné de l’eau vive" (Jn 4,10).

Se tenir dans le Nom de Jésus

Je n’attendrai pas d’être dans des dispositions idéales mais j’irai me plonger dans le Nom de Jésus : tout commence dans le Nom de Jésus et le tout de nos vies se recueille dans le Nom de Jésus. "Car il n’y a pas sous le ciel d’autre nom par lequel nous puissions être sauvés" (Ac 4,12).

Pour ma part, je suis convaincue de ceci : cette source qui irrigue toute notre vie et sans laquelle nous serions condamnés à mourir de soif, cette source risque toujours de s’ensabler dans le désert des jours, dans la longueur et la banalité du temps qui passe et qui use les eaux les plus vives. C’est pourquoi la tradition spirituelle chrétienne a mis la prière et la méditation de la Parole au cœur de la vie.

Ainsi s’ouvre, pour nous, l’espace permanent où se fait entendre le chant de la source, la voix du Verbe, soit que nous mangions, soit que nous marchions avec d’autres sur le chemin, soit que nous dormions…

C’est là que se joue, pour nous, la conversion du cœur et l’unification de notre vie, le chemin de notre accomplissement humain, spirituel, évangélique, baptismal.

Je sais la source qui jaillit et fuit
Malgré la nuit.

Cette source éternelle est cachée,
Mais moi je sais où elle a sa demeure,
Malgré la nuit.

Ne sais son origine, car n’en a point,
Mais je sais que d’elle toute origine vient,
Malgré la nuit.

Cette source éternelle est cachée,
En ce pain vivant pour nous donner vie,
Malgré la nuit.

Elle appelle là toutes les créatures,
Et de cette eau s’abreuvent, quoique dans l’obscur,
Car c’est la nuit.

Cette source vive que je désire,
En ce pain de vie je la vois,
Malgré la nuit.

(Jean de la Croix, Malgré la nuit)

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