Luc 11, 47-54

Ne pas retenir la vie…

Il y a quelques jours, Paul affirmait à son disciple, Timothé, que l’on «n’enchaîne pas la Parole de Dieu» ! Elle est effectivement bien mystérieuse cette parole qui trouve son chemin même dans le cœur des plus endurcis, des parcours les plus improbables ou désespérés, comme l’est ce chemin de paix – fragile certes ! – mais réel qui s’est frayé un accès aux cœurs des grands de ce monde pour faire se profiler la possibilité que les armes se taisent, même un instant pour permettre à la vie de prendre, ne serait-ce qu’un peu, place ! Mais cela a un certain nombre d’exigences dont celle d’être en phase avec la vérité, c’est-à-dire en accord avec soi-même, agir de manière authentique et alignée avec ses valeurs profondes, ce qui demande de l’écoute de soi, de l’introspection et le courage d’être honnête avec soi-même, avec Dieu et avec les autres. C’est vivre en harmonie avec son être véritable, se rendant proche de l’amour de Dieu, en se détachant du désir de paraître autre et en acceptant pleinement ses émotions, ses limites, ses richesses et fragilités. Or ne serait-ce pas précisément sur cette absence de cohérence avec soi et face à Dieu, pourrait-on dire, que Jésus critique scribes et pharisiens, c’est-à-dire ceux qui sont censés être les plus avancés dans la connaissance de la Loi et des Ecritures et dans ce travail de mise en cohérence avec sa propre vie ? Jésus leur reproche, de surcroît, de ne pas « cheminer avec » les autres, de s’approprier les connaissances liturgiques, théologiques, juridiques. Ils ont dit-il « enlevé les clés de la connaissance » et en plus ils s’opposent à ceux qui la recherche. Il ne s’agit donc pas de désigner ces scribes et ces pharisiens, les savants et les pratiquants zélés de l’époque parce qu’ils s’attribuent le beau rôle en honorant ceux que leurs ancêtres n’ont pas reconnus. C’est de cette génération au présent que parle Jésus cela veut dire que c’est de maintenant, c’est d’aujourd’hui qu’il est question. Or pour Jésus le monopole de certains dans la connaissance des Ecritures et de la Loi au détriment du chemin que d’autres peuvent entamer, est une violence exercée envers la Parole de Dieu. Il la met même en parallèle avec les violences à l’encontre des prophètes. Et il souligne la responsabilité de cette génération, de toutes générations, c’est-à-dire de celles et ceux à qui s’adressent maintenant ses paroles.

C’est à nous que Jésus s’adresse dans l’aujourd’hui de notre temps. Nous sommes engagés plus que jamais dans un processus qui consiste à s’interroger sur notre mission, à être avec l’Eglise interpellés par l’évangile d’aujourd’hui sur le partage des connaissances que nous acquérons et sur l’accompagnement que nous offrons à ceux ou celles qui se mettent en route dans cette quête de sens et d’une vie ajustée à l’évangile. Où que nous soyons, nos communautés, quelle que soit leur tradition, leurs insertions, leurs types de présences, reçoivent ce questionnement sur leur capacité à donner envie de connaître Dieu, de reconnaître sa Parole. Ces paroles de Jésus nous font réfléchir à notre tour sur notre envie de partager cette connaissance et donc aussi les conséquences de celle-ci sur notre vie, sur la vie des chrétiens, sur la vie des humains. Car cheminer ensemble avec le Christ, faire route avec lui oblige à avancer, à changer, à se déplacer, donc à transmettre la vie ! Ne pas retenir la vie, mais en transmettre tout ce qui permet de la nourrir sans nous voiler ses zones obscures, telle que celle où les prophètes de tous temps ne sont pas écoutés voir même condamnés à mort, et n’ayant de cesse de transmettre ce que nous avons reçu car tout ce qui n’est pas transmis est perdu !

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