« Vous êtes étrangement aimée » (L337, 2). L’expression semble reprise du P. Vallée, Dominicain, prédicateur au carmel de Dijon, par lequel Elisabeth s’est enracinée dans le mystère de la Trinité. Cette entrée en matière souligne, combien Elisabeth a une vive conscience de l’amour fou de Dieu pour tout humain. Si Elisabeth parle peu explicitement de la Miséricorde c’est que celle-ci est, pour elle, toute contenue dans le mot amour. Dans une lettre à sa mère, en juin 1906 (L 280), elle écrit : « Vois-tu, il y a un mot de St Paul qui est comme un résumé de ma vie et que l’on pourrait écrire sur chacun de ses instants : « à cause de son trop grand amour » (citation d’Ep 2,4) ». Ce trop grand amour, reconnu, appelle comme en reconnaissance une confiance sans fin.
C’est cette confiance qui lui permet de dire à Mère Germaine : « Quand même vous n’auriez rien fait pour attirer cette grâce sinon ce que fait la créature : œuvres de péchés et de misères… Il fera tout en vous » (L 337,5). La grâce d’Elisabeth est de consentir à la révélation de l’excès d’amour malgré les apparences contraires, les silences et les démentis de la sensibilité ou de l’imagination. S’appuyant sur cette parole de St Paul aux Éphésiens : « Dieu qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a aimés, alors que nous étions mort par suite de nos fautes, nous a fait revivre avec le Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés » (Ep 2,4-5). La confiance d’Elisabeth en l’Amour de Dieu est sans mesure, quelle que soit l’épaisseur des ténèbres.