« Que serions-nous sans Marguerite ? »

Sublime, splendide, naturelle… tant d’exclamations dans les journaux qui trompent Marguerite, Dumont, comtesse aux bonnes œuvres, sur la qualité réelle de sa voix. Elle se croit célèbre, unique, splendide alors et que l’écouter devient un supplice… elle se donne en concert dans ce ridicule bien plus qu’elle ne donne un concert. Mais le mensonge est au centre de ce film… Personne n’ose lui révéler la vérité, par peur de la perdre….
Inspiré d’une histoire vraie, le réalisateur a magnifiquement orchestré ce drame en plusieurs actes tel un opéra dramatique.
Marguerite,  victime du mensonge de ceux qui courent après sa fortune, de son rêve d’une représentation à l’opéra, d’un professeur de musique … et à mesure que le drame se déploie le mensonge qui ne semble pouvoir s’arrêter  se répand, se complexifie.
Le spectateur passe du rire dès le début du film, à l’empathie pour Marguerite, l’incompréhension, et le désir de voir advenir la vérité tout en se questionnant sur ce qu’il est bon de faire, pour elle, pour son mari qui s’interroge : « Qu’est ce qu’elle a à beugler comme ça ? »
Le réalisateur joue sur des thématiques bibliques telles que le jardin d’Eden, et dans le scénario le serpent, la Croix sont des tournants incontournables. Nous pouvons nous questionner sur les objets du jardin de Marguerite : l’œil, le paon, les ailes…  observer le jeu de Madelphos, le serviteur de Marguerite et de s’interroger sur son identité, ses intentions.
Un film à voir et à revoir pour entrer plus largement dans cette vaste réflexion sur le mensonge, la richesse, la débauche… suggérée par son auteur …

Suite de l’analyse pour ceux qui ont vu le film sinon, la fin n’aura plus de secret !

George Dumont fuit dans les bras d’une maîtresse, alors que son épouse Marguerite est devenue une sorte d’animal criant, tel le paon qu’elle a dans son jardin et que l’on entend de temps à autre.  Il se réfugie aussi dans l’absence, le retard aux concerts  sur un croisement de route dans la campagne, là où se dresse une croix. A plusieurs reprises, ce plan de la Croix, semble montrer le lieu d’une butée, là où le mensonge doit finir, la vérité advenir… Mais le passage de la croix est difficile …..George n’entendra pas la phrase de Marguerite « Il n’y a rien de plus important que le public, à part le regard de l’homme qu’on aime ». Elle est prête à tout entendre de lui, mais il a peur de la perdre et préférera le mensonge.

marguerite_finalPar ailleurs, nous sommes comme projetés dans le jardin du paradis. Marguerite est la simplicité même, en quête du regard de son mari, désirant chanter pour lui, cherchant à être aimée. Innocente, elle revêtira dans une scène finale, les ailes d’un ange. Folle ? Peut-être…Mais si touchante dans la confiance et la candeur qu’elle met dans les autres. Mais le serpent veille de manière sournoise à la tromper. Adelphos, le frère (en grec) , celui sur qui l’on compte se transforme en Madelbos, apparent fidèle serviteur, qui rode autour de ce couple.  Il s’obstinera à brûler les ailes de Madame, utiliser le chantage pour parvenir à ses fins. Madelphos jouit du mensonge en prenant des clichés photos, signe du ridicule, de la folie de Marguerite. Patiemment, sournoisement, il attend le dernier cliché : le sacrifice de Madame. Il jouit de cette mort à venir.  Le film s’achève dans une scène sublime : une piéta, le mari recueille dans ses bras l’innocence même, Marguerite son épouse.

Marie Guillaumin, CSJ, St Guilhe-le-Désert

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