Une conception, des dessins, des mesures, du cuir, des découpes et des coutures, du métal, des yeux, des mains, des machines, et bien d’autres éléments, ont participé à ta fabrication. Neuf, tu avais une certaine beauté ; usé tu en a une certaine !
Les marques et les rayures que l’on ne voyait pas auparavant sur ta peau rappellent les rides et les marques d’un visage humain. Chaque trait raconte une histoire, indique un lieu, fait écho à un souci ou à une joie, refait un chemin parcouru à la rencontre de quelqu’un, et conte une pluie qui t’avait surpris en plein été.
Ton intérieur n’est pas moins riche que ton extérieur. Il est un peu plus intime ; il porte, mélangés, les traces de ce qu’un jour tu avais abrité en toi ainsi que la résonnance d’un aujourd’hui : il garde de petites pièces de monnaie qui ne sont plus en circulation sur le marché ; un caillou blanc, ramassé en cet après-midi de juillet, lui serre la gorge, parce qu’il sait que ce visage qui était là n’est plus ; un mouchoir qui sentait jadis la lavande lui manque, ainsi que cette robe en velours bleu dont il n’oublie jamais la caresse ; il a la nostalgie du bruit des clés de cette maison de campagne ; lui pèsent tellement toutes ces cartes bancaires, ces cartes de fidélités, de crédit, d’assurance, etc. ; quelques photos, de vieux, de jeunes et d’enfants, le consolent dans sa solitude…
Tu appartiens toujours à quelqu’un, et celui qui te regarde peut lire, comme dans la paume d’une main, son passé, son présent avec toi, et peut-être son avenir.
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